mercredi 25 avril 2012

Inspiration mahoraise : la salouva

En ce moment je suis une immense veinarde et vais régulièrement à Mayotte pour le boulot. En bonne passionnée de costumes, une des choses qui me plaisent tout particulièrement là-bas, c'est l'habit féminin : la (ou le) salouva. Cet habit est porté quotidiennement par une majorité de femmes (et par presque toutes le vendredi, jour de la grande prière pour les musulmans). D'autres femmes ont opté pour des coupes occidentales, mais leurs habits restent souvent taillés dans le tissu typique de la salouva.
La salouva traditionnelle se compose de trois pièces de tissu :
  • la pièce principale, qui s'enroule autour de la poitrine, à la façon d'une serviette de bain au sortir de la douche. Cette pièce descend jusqu'aux chevilles. Elle est portée sur un jupon uni bordé de macramé (la dentelle dépasse sous la soulava au niveau de la cheville : super grâcieux, un peu coquin, j'adore!) et un T-shirt en synthétique uni également dont les manches s'arrêtent au-dessus du coudes et qui peut être plus ou moins ouvragé.
  • une pièce plus petite qui s'enroule autour des cheveux, soit à la façon d'un voile, soit à la façon d'une coiffe comme peuvent le faire les femmes d'Afrique noire.
  • une pièce plus étroite et longue qui sert d'étole, qui se porte soit sur une épaule, soit sur les deux en laissant les extrêmités pendantes dans le dos.
Parfois, les trois pièces de la salouva sont prises dans le même tissu, parfois dans des tissus assortis.

Pour voir des images de ce que ça donne porté, tapez "salouva Mayotte" dans toute bonne barre de recherche, vous aurez plein d'exemples.

Alors il est vrai que je ne suis pas fan du drapé, qui dissimule les formes du corps tout en faisant ressortir les bourrelets à la hauteur des aisselles.

En revanche ces tissus me touchent profondément. On y retrouve l'âme de Mayotte. Carrément. Les salouvas, mélanges de boubou et sari nous rappellent que Mayotte est un petit archipel entre l'Inde et l'Afrique. A Mayotte la nature est omniprésente : la mer est visible en tout point du territoire, la végétation luxuriante offre ombres, parfums, nourriture et décors somptueux et la faune est totalement surprenante (les petits makis et leur mains délicates, les Zébus et leur réserve d'eau sur la nuque, les énormes oiseaux, les dauphins et tortues et, bien sûr, les coraux...). Cette nature, symbolisée et mythifiée, est à la base de la quasi totalité des motifs de salouva. On retrouve la chatoyance du soleil dans les paillettes des salouvas et la lumière dans leurs couleurs. J'irais même jusqu'à dire que le dessein des motifs est à l'image des rapports sociaux des mahorais : joyeux et paisible. Heureux d'être là en somme. Pourtant complexes à comprendre, organisés autour de familles invisibles pour l'oeil occidental.
Pour aller plus loin dans l'analyse, on peut aussi noter que certains motifs et couleurs sont porteurs de significations : lorsque les motifs forment de larges carrés rouges et blancs, la femme marque son appartenance à la communauté comorienne (Anjouan est à peine une centaine de kilomètres par la mer).

Tout ça pour dire que la salouva, c'est chouette. Et que j'en ai acquis une, particulièrement fine.



Je ne sais pas encore ce que j'en ferai : j'ai 50 000 projets à la seconde mais je n'ose pas couper. Certainement un petit haut contemporain, à mettre sous un tailleur pour l'égayer un peu. Et puis peut-être une robe du soir 1910, pourquoi pas une tenue sarouel, sur la mode de mon pote Poiret...

2 commentaires:

  1. Je ne connaissais pas du tout, très intéressant, et je ne suis pas fan des tons orangés mais j'adore ton tissu. Je vote pour la tenue 1910! (oui bon ok, je suis totalement partiale sur ce coup là :-p) Bon courage pour tout tes projets

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  2. Venant moi même de la Réunion (voisine de Mayotte donc), je connaissais mais je trouve ton article très bien écrit et j'aime beaucoup comment tu analyses ce costume traditionnel. Et je rejoins Inevara, j'aime beaucoup également ton tissu, nul doute que tu en feras quelque chose de bien !

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